mardi 28 juin 2016

(c) Bruno Legeai

J'aurais voulu de l'herbe rase ; toi, tu as insisté pour que nous semions de la prairie folle
dans notre jardin minuscule de trente mètres carré
souvent tu me demandes pourquoi je m'attarde sur des détails
pourquoi je ne lève pas davantage le regard
quelle peur me verrouille et m'empêche de saisir
à bras le corps
le monde infini
c'est que le monde, amour, est un jardin de trente mètres carré
nous y tournons à petits pas, cultivant l'illusion de vivre dans la forêt
trente mètres carré c'est peu, mais cela doit suffire
il y a ta peau, tes yeux par là, inondés de ciel bleu
que tu poses pour moi
rien que pour moi
entre les orties et nos frêles hortensias

dimanche 26 juin 2016

Dehors : recueil sans abri - extraits

Os de Clara Regy

sur son bras un tatouage
dégoulinant
un prénom raté
"comme une vie"
qu'il me dit

j'ai faim aussi
il bouche sa bouche
de vin mauvais
me caresse de la botte
mais je sais

nous puons tous les deux
pas de gêne
entre nous
sous sa couenne
sous ma peau
on sait comment c'était

j'aboie  pour le défendre
et il gueule plus fort
qui du chien
qui du mec rêve d'os

les passants
nous regardent
pareil(s)
ils disent
"pauvre chien"
ne sais plus
l'adjectif
pour qui

les grammaires
et les conjugaisons
ont avalé nos mots
qui ne remontent plus

j'aboie pour le défendre
et il gueule plus fort
qui du chien
qui du mec
qui de l'os

rêve
encore


***

Marcher si marcher de Rodrigue Lavallé

marcher si marcher
dehors     puisqu'il semble
sous le vieux jean sur la peau
sous le vieux pull sous la peau
dans     à travers    l'espace
entre jean & pull & la peau
ce qu'il en reste même
de croûtes & de laine serrées
laine & peau macérée
le vent passe    entre

le vent passe entre pull & la peau
ce qu'il en reste
& marcher
[...]

***

Papaclodo, encore de Roland Nadaus

[...]
Un soir
(qui était déjà matin)
rentrant d'une réunion militante
je te découvris ronflant
sur le palier de notre F2 sans eau chaude mais
derrière la porte palière
dormaient ma femme et notre
nouvelle née toi
tu ronflais
Tu avais bu plus qu'elles
et pas du lait
mais tu nous revenais
- j't'ai embrassé Tu as roté -

Et moi qui n'étais pas
ton fils génétique mais celui
auquel tu avais donné un nom
(mais cela je ne l'ai su que
disons très très tard)
et toi qui n'étais pas mon père
géniteur génitif
toi et moi
nous avons passé une nuit
épuisante d'amour à force de parler de se parler
    de parler
- Au matin mais au matin seulement
nous nous sommes embrassés -
[...]



Dehors : recueil sans abri, collectif, Éditions Janus, 2016
Les bénéfices sont reversés à ActionFroid

jeudi 23 juin 2016

Sur la table, éditions QazaQ

Mon recueil Sur la table est toujours disponible aux éditions QazaQ (en format epub ou pdf)
Des extraits à écouter ci-dessous

par Christophe Sanchez



par Luc Comeau Montasse



par moi-même

vendredi 17 juin 2016

Feu de tout bois - on en parle

La revue Nouveaux Délits lance "Délits buissonniers", une collection de tirés à part pour des auteurs choisis ayant déjà été publiés dans la revue. Parution dans ce cadre de Feu de tout bois  avec des illustrations originales en n&b de Sophie Vissière

Sanda Voïca en parle dans la revue Paysages écrits, n°28 - extrait :
"Dans ce recueil, Murièle Modély fait, encore une fois, en paraphrasant le titre, poème de tout bois. Chaque instant vécu devient poésie. Et quelle poésie : visions et épiphanies, sans cesse. Visions : « certains jours/la langue quitte la bouche/et se balade limace au-dessus de nos têtes » (cuisine). Vision apocalyptique dans voie basse. On pourrait même parler d’un livre des visions. Mais il y a des épiphanies aussi, et elles coïncident souvent avec les visions : le poème sommeil à citer en entier. Le quotidien, le passé (l’enfance) et le futur passés à la moulinette et réassemblés, avec quelques ingrédients : humour, voire dérision, lucidité, intelligence, maîtrise de la langue et dépassement du langage : «aujourd’hui, c’est la fête du couteau/c’est marqué en rouge à côté de la date/il y a la fête des mères, des pères/celle de la jupe, du voile/il y a aussi un jour/de l’amour/des morts/sans portable/sans voiture/sans électricité/la journée du lard ou du cochon/des seins/du saint des saints/des revendications, des recommandations/ de l’économie triomphante/du brame/des drames/des femmes/des hommes/(non, pas des hommes – question d’excroissance,/la case est trop petite)/vivre au fond/ n’est pas bien compliqué/il suffit de s’en tenir au mot du jour/composer décomposer, recomposer/une croix après l’autre/l’empilement des faits » (éphéméride) [...]"

Cathy Garcia en dit ceci :
"Ici Murièle Modély nous fait partager une forme de stupéfaction, nous fait voir à travers son regard un peu décalé..., aiguisé, perçant, son humour un peu noir et ici avec un amour fou, ses enfants qu'elle observe aller et venir, vivre, rire, questionner et l'engloutir. Poésie intimiste, poésie du quotidien qui prend chez Murièle quelque chose de quasi fantastique, organique, un peu terrifiant et on s'en régale, ça gicle, ça remue, du vivant sans retenue qui fait, oui, feu de tout bois."


Un extrait

"ils lancent leurs yeux sur moi
comme une lame

je sens leur rayon laser
leur récit fulgurant
jaillir

sous le derme
je sens remonter les picotements
l'emballement lyrique qui peine

à restituer d'un poème
le scintillement des étoiles
du trou noir de leur cornée"


Autres extraits sur Chemins battus de Morgan Riet
& sur Les portes de la perception de Murièle Camac





























 10 € port offert,  à commander à : Association Nouveaux délits / Létou / 46330 St Cirq-Lapopie








lundi 13 juin 2016

samedi 11 juin 2016

"Exister" de Grégoire Damon

"exister c'est vulgaire
s'exprimer c'est la dernière des beauferies
tu commences comme ça et puis tu lis les conseils sexo de Figaro Madame
et puis un jour tu te fais couper les cheveux sur un coup de tête
et ton chef de service se met à pleurer

si encore j'avais l'excuse de sortir d'un génocide
ou d'avoir un coquard sur l'œil
ou d'être très riche
ou très pauvre
(ô ma fille si tu veux percer en littérature
sois bonne et parle de la Shoah)

mais non
je suis là et c'était déjà comme ça quand je suis arrivé
peux pas dire que j'ai choisi non plus
mais quand on se lève chaque matin à six heures pour faire
quelque chose qui numériquement existe moins que
par exemple un premier ministre qui parle catalan
franchement
il faut avoir la foi"


Poème de Grégoire Damon extrait de son blog Peau de gueule

lundi 6 juin 2016

Mézin fête les écrivains - dimanche 12 juin 2016

Le 12 juin, lors du festival Mézin Fête les Ecrivains, l'occasion a été offerte de rencontrer et écouter les auteurs suivants : Anna de Sandre, Derek Münn, Nicolas Le Golvan, Laure Mézarigue, Suzanne Max, Astrid Waliszek et Dany Moreuil... J'ai pour ma part lu un texte au sommaire du premier numéro de la revue Incandescentes : "Visiter le paradis au moins une fois avant de crever" de Marlène Tissot.  Ça s'est passé aux Jardins Paysagers de Mézin (47) - crédits photo : Murièle Modély / Xavier de Bordeaux


dimanche 5 juin 2016

Zombie - extrait de Feu de tout bois


Zombie extrait de "Feu de tout bois" de Murièle Modély, illustrations de Sophie Vissière, collection Délits buissonniers n°1, juillet 2016. Autre extrait lu par . Commander le recueil à Association Nouveaux délits / Létou / 46330 St Cirq-Lapopie