lundi 28 décembre 2015
Realpoetik !
C'est le nom de la revue de poésie en ligne que Sammy Sapin et Grégoire Damon ont cousu avec leurs petites mains.
Elle paraîtra toutes les trois-quatre semaines jusqu'à épuisement des stocks d'uranium 235.
Au sommaire du n°1 : Murièle Modély, Bernard Deglet, Frédérick Houdaer.
Plus des vrais morceaux de critique, par Émile Puyg et Étienne Mora.
Soyez les premiers à poser vos yeux sur cette alternative au Lagarde & Michard du 23ème siècle.
Pour se cultiver avec Realpoetik : www.realpoetik.fr
Pour aimer Realpoetik : bougez pas vous y êtes.
À la bonne vôtre !
jeudi 24 décembre 2015
La poésie se fait dans l'oreille
Écoutez la voix vive de poètes sur Cérumen
Merci à Sammy Sapin (le même du post précédent)de m'y avoir accueilli avec un extrait de Sur la table, recueil inédit.
Poème de Sammy Sapin
"Cette fille m'a dit
Tu sais les seins ne sont jamais que
Tu sais les seins ne sont jamais que
deux boules de matière grasse
gélatineuse qui
se changent en lait puis se changent en
beurre puis se changent
en tumeur
–s’il t’en poussait des mamelles
tu t’en
lasserais très vite.
Mais je maintiens : s’il m’en
poussait je
passerais mes jours
mes nuits
à les manipuler
dans l’émerveillement
de la propriété privée
Tu te leurres, Sapin Sammy
me dit cette fille
en recalant sa poitrine admirable
dans son soutien-gorge :
on se lasse de tout, et même des choses
les plus chaudes
et douces
samedi 19 décembre 2015
en prenant sa main aujourd'hui
j'ai senti pour la première fois
combien elle était
infiniment là
et déjà ailleurs
dans cet entre-deux
où des forêts broussailleuses poussent
sur des chairs inhabitées
où des poires vierges de morsures
déforment le torse des filles
ai-je vraiment à voir avec cette géographie neuve
me dis-je, ses doigts chauds comme le souvenir
d'un futur
auquel je ne peux et ne dois
elle va parcourir la lande seule
il me faut la laisser s'éloigner
ne garder que sa main comme un gant
où nicher ma paume froide
j'ai senti pour la première fois
combien elle était
infiniment là
et déjà ailleurs
dans cet entre-deux
où des forêts broussailleuses poussent
sur des chairs inhabitées
où des poires vierges de morsures
déforment le torse des filles
ai-je vraiment à voir avec cette géographie neuve
me dis-je, ses doigts chauds comme le souvenir
d'un futur
auquel je ne peux et ne dois
elle va parcourir la lande seule
il me faut la laisser s'éloigner
ne garder que sa main comme un gant
où nicher ma paume froide
jeudi 17 décembre 2015
tu sens monter la vague, autour de toi
des femmes recroquevillées dans de vieilles peaux de bêtes
t'observent du coin de l’œil, elles savent
la mer monte, l'asphyxie semble imminente
chaque regard est comme une lame plantée dans chaque centimètre de chair
à nu
elles savent, ne comprennent pas : "comment peut-on laisser faire ça
où se trouvent les grilles pour définitivement éloigner l'animal ?"
la peur est une mélasse, elle englue
toutes les femmes à couvert qui baissent des paupières
leurs lèvres molles plissées dans un O sidéré
la grille est au-dessus et aucun de nos mots
n'empêchera la noyade
bêtes et monstres mêlés
ensemble
des femmes recroquevillées dans de vieilles peaux de bêtes
t'observent du coin de l’œil, elles savent
la mer monte, l'asphyxie semble imminente
chaque regard est comme une lame plantée dans chaque centimètre de chair
à nu
elles savent, ne comprennent pas : "comment peut-on laisser faire ça
où se trouvent les grilles pour définitivement éloigner l'animal ?"
la peur est une mélasse, elle englue
toutes les femmes à couvert qui baissent des paupières
leurs lèvres molles plissées dans un O sidéré
la grille est au-dessus et aucun de nos mots
n'empêchera la noyade
bêtes et monstres mêlés
ensemble
lundi 14 décembre 2015
dimanche 13 décembre 2015
la peinture tombe par plaques au dessus du lit
sous les draps, tout s'émiette peu à peu
seul mon dos connaît ton dos
mieux que n'importe quelle partie de nos corps
je sens rouler des gouttes sur mes joues
tu crois que je pleure : je ne rectifie pas
et reste les yeux fixes sur l'écoulement au plafond
*
le rétrécissement de notre vie dans la chambre
n'est que l'écho
de ce racornissement de nos pas dans la cendre
tout le jour, nous marchons sur des morts
cadavres de rêves, corps en lambeaux d'idéaux
ces deuils ne pèsent rien : tous les fils s'effilochent
le temps est efficace
mais nous marchons aussi la nuit, nos jambes impatientes
la peau reconnaît ce qu'oublient nos paroles
il y a maintenant d'autres morts
et ceux-là portent un nom
qui pèse sur la langue
sous les draps, tout s'émiette peu à peu
seul mon dos connaît ton dos
mieux que n'importe quelle partie de nos corps
je sens rouler des gouttes sur mes joues
tu crois que je pleure : je ne rectifie pas
et reste les yeux fixes sur l'écoulement au plafond
*
le rétrécissement de notre vie dans la chambre
n'est que l'écho
de ce racornissement de nos pas dans la cendre
tout le jour, nous marchons sur des morts
cadavres de rêves, corps en lambeaux d'idéaux
ces deuils ne pèsent rien : tous les fils s'effilochent
le temps est efficace
mais nous marchons aussi la nuit, nos jambes impatientes
la peau reconnaît ce qu'oublient nos paroles
il y a maintenant d'autres morts
et ceux-là portent un nom
qui pèse sur la langue
vendredi 11 décembre 2015
Il s’agit de refaire ce qui n’est pas fini
de jeter sur la toile le tu le elle
reconstruire
réinventer
le je de miroirs
il s’agit de revivre ce qui n’a pas vécu
le tu le elle et moi
rebâtir la colonne
dévier
sentir l’écart
se creuser
là tout en haut
les appels d’air
de mon cerveau
je prends des souvenirs
n’importe lesquels
l’ordre n'a pas d’importance
leur véracité non plus
le fil a cessé de se tendre
mon corps est ce tissu
rempli de trous
une plaine où s’ébattent
de joyeux fous
je prends un souvenir
n’importe lequel
j’y enfourne une humeur
un paysage
les gens autour de moi
ne sont que des paysages
être n’est que paraître
singer
représenter
les gens autour de moi
des scènes
des portraits
il s’agit de refaire tout ce que j’ai vécu
l’écrire
le réécrire
en pied
de jeter sur la toile le tu le elle
reconstruire
réinventer
le je de miroirs
il s’agit de revivre ce qui n’a pas vécu
le tu le elle et moi
rebâtir la colonne
dévier
sentir l’écart
se creuser
là tout en haut
les appels d’air
de mon cerveau
je prends des souvenirs
n’importe lesquels
l’ordre n'a pas d’importance
leur véracité non plus
le fil a cessé de se tendre
mon corps est ce tissu
rempli de trous
une plaine où s’ébattent
de joyeux fous
je prends un souvenir
n’importe lequel
j’y enfourne une humeur
un paysage
les gens autour de moi
ne sont que des paysages
être n’est que paraître
singer
représenter
les gens autour de moi
des scènes
des portraits
il s’agit de refaire tout ce que j’ai vécu
l’écrire
le réécrire
en pied
(republication)
lundi 7 décembre 2015
Marlène Tissot & compagnie
Et dans la série X & compagnie voici le 17ème: Marlene Tissot & compagnie.
Marlène Tissot a invité Lidia Badal, Samantha Barendson, Isabelle Bonat-Luciani, Séverine Castelant, Hélène Dassavray, Estelle Fenzy, Alexandra Kalyani, Mélanie Leblanc, Mijo, Perrine le Querrec, Jany Pineau, Saida Roquet et moi-même.
Pour commander ce numéro 100% XX, clic par là
Marlène Tissot a invité Lidia Badal, Samantha Barendson, Isabelle Bonat-Luciani, Séverine Castelant, Hélène Dassavray, Estelle Fenzy, Alexandra Kalyani, Mélanie Leblanc, Mijo, Perrine le Querrec, Jany Pineau, Saida Roquet et moi-même.
Pour commander ce numéro 100% XX, clic par là
jeudi 3 décembre 2015
lundi 30 novembre 2015
petite mort
souvent
quand nous faisons l’amour
je pense
au repas du dimanche
le poids sur l’estomac
cette ambiance empesée
tous les deux le dimanche
si cruellement gais
chacun bien à sa place
et de l’autre côté
le verre
l’assiette
devant la chaise vide
quand nous faisons l’amour
je pense souvent
au bréchet sous la dent
le jus qui coule
cette triste violence
de la chair mâchée
pendant que nous faisons
j’entends
j’attends
la reddition de l’os
mes jambes écartées
la douleur qui se tend
dans tes muscles bandés
nos corps
qui trompent
tu fais l’amour je baise
sous la table je jette
la torsion le plaisir
les bouts de verre brisé
dans le trou
où tout tombe
souvent
*
Parfois
je ne jouis pas
je pense aux fleurs fanées
sur la pierre grise
Parfois je jouis
ça ne change rien :
je pense quand même
quand nous faisons l’amour
je pense
au repas du dimanche
le poids sur l’estomac
cette ambiance empesée
tous les deux le dimanche
si cruellement gais
chacun bien à sa place
et de l’autre côté
le verre
l’assiette
devant la chaise vide
quand nous faisons l’amour
je pense souvent
au bréchet sous la dent
le jus qui coule
cette triste violence
de la chair mâchée
pendant que nous faisons
j’entends
j’attends
la reddition de l’os
mes jambes écartées
la douleur qui se tend
dans tes muscles bandés
nos corps
qui trompent
tu fais l’amour je baise
sous la table je jette
la torsion le plaisir
les bouts de verre brisé
dans le trou
où tout tombe
souvent
*
Parfois
je ne jouis pas
je pense aux fleurs fanées
sur la pierre grise
Parfois je jouis
ça ne change rien :
je pense quand même
parution initiale dans la revue Charogne
samedi 28 novembre 2015
dimanche 15 novembre 2015
"il faut continuer, je ne peux pas continuer, je vais continuer"
"(…) il faut continuer, je ne peux pas continuer, il faut continuer, je
vais donc continuer, il faut dire des mots, tant qu’il y en a, il faut
les dire, jusqu’à ce qu’ils me trouvent, jusqu’à ce qu’ils me disent,
étrange peine, étrange faute, il faut continuer, c’est peut-être déjà
fait, ils m’ont peut-être déjà dit, ils m’ont peut-être porté jusqu’au
seuil de mon histoire, devant la porte qui s’ouvre sur mon histoire, ça
m’étonnerait, si elle s’ouvre, ça va être moi, ça va être le silence, là
où je suis, je ne sais pas, je ne le saurai jamais, dans le silence on
ne sait pas, il faut continuer, je ne peux pas continuer, je vais
continuer."
L’innommable, Samuel Beckett, 1953
L’innommable, Samuel Beckett, 1953
samedi 14 novembre 2015
lundi 26 octobre 2015
j'ai plongé la main
dans ma bouche
ma gorge
l'ai enfoncée le plus loin possible
étrangement le déboîtement de mon épaule
ne m'a causé aucune douleur
je n'ai entendu aucun craquement non plus
lorsque mon poignet a passé l'obstacle des incisives
j'ai la bouche grande ouverte
indécemment ouverte
à la mesure de tes yeux écarquillés
tu as balbutié quelque chose
lorsque tu as compris ce que je faisais
et maintenant tu pleures
tu répètes en boucle "tu saignes... tu saignes..."
la petite bête aux yeux de faon qui tremble
ne saigne pas
je l'examine sous toutes les coutures
ne décèle aucune coupure
et tu répètes encore
stupidement
"tu saignes... tu saignes..."
je plonge mon regard dans les yeux de ma bête :
elle sort sa langue longue
puis lèche
mes doigts rougis
dans ma bouche
ma gorge
l'ai enfoncée le plus loin possible
étrangement le déboîtement de mon épaule
ne m'a causé aucune douleur
je n'ai entendu aucun craquement non plus
lorsque mon poignet a passé l'obstacle des incisives
j'ai la bouche grande ouverte
indécemment ouverte
à la mesure de tes yeux écarquillés
tu as balbutié quelque chose
lorsque tu as compris ce que je faisais
et maintenant tu pleures
tu répètes en boucle "tu saignes... tu saignes..."
la petite bête aux yeux de faon qui tremble
ne saigne pas
je l'examine sous toutes les coutures
ne décèle aucune coupure
et tu répètes encore
stupidement
"tu saignes... tu saignes..."
je plonge mon regard dans les yeux de ma bête :
elle sort sa langue longue
puis lèche
mes doigts rougis
vendredi 23 octobre 2015
mardi 20 octobre 2015
j'ai une bête à l'intérieur
une bête épaisse qui s'agite
à chaque pas
je sens sous mes tissus
la corne aiguë de sa carapace
inscrire de longues et profondes rainures
sur le fil de mes os
je sens qu'à l'intérieur la moelle coule
que ma bestiole roule
des yeux
et de la langue
je sens
la déglutition
les battements de cils qui excitent la peur
qui coupe les jambes et la bête ronronne
dans des mouvements désordonnés
sur mes tendons affolés
elle aligne
des chiffres
des symboles
des noeuds serrés sur mes cordes vocales
et souvent de douleur, je me mets à jeter
des borborygmes dissonants
que je ne comprends pas
que tu ne comprends pas
ma bête mène une guerre intérieure : je suis sa prisonnière et je suis sa geôlière
à force d'avoir mal, je ne sais plus au fond qui d'elle ou de moi est le vrai contenant
une bête épaisse qui s'agite
à chaque pas
je sens sous mes tissus
la corne aiguë de sa carapace
inscrire de longues et profondes rainures
sur le fil de mes os
je sens qu'à l'intérieur la moelle coule
que ma bestiole roule
des yeux
et de la langue
je sens
la déglutition
les battements de cils qui excitent la peur
qui coupe les jambes et la bête ronronne
dans des mouvements désordonnés
sur mes tendons affolés
elle aligne
des chiffres
des symboles
des noeuds serrés sur mes cordes vocales
et souvent de douleur, je me mets à jeter
des borborygmes dissonants
que je ne comprends pas
que tu ne comprends pas
ma bête mène une guerre intérieure : je suis sa prisonnière et je suis sa geôlière
à force d'avoir mal, je ne sais plus au fond qui d'elle ou de moi est le vrai contenant
samedi 26 septembre 2015
troupeau
il y a cette avalanche de mots friables autour
et dans notre cercle étroit, l'odeur
fraîche, verte, tendre
de nos chairs coupées
nos épaules côte à côte
ceinturant la forêt
et dans notre cercle étroit, l'odeur
fraîche, verte, tendre
de nos chairs coupées
nos épaules côte à côte
ceinturant la forêt
extrait de Feu de tout bois, écrit en cours
lundi 21 septembre 2015
"L'amour, lui aussi, comme le miroir et comme la mort, apaise l'utopie de
votre corps, il la fait taire, il la calme, il l'enferme comme dans une
boîte, il la clôt et il la scelle. C'est pourquoi il est si proche
parent de l'illusion du miroir et de la menace de la mort; et si malgré
ces deux figures périlleuses qui l'entourent, on aime tant faire
l'amour, c'est parce que dans l'amour le corps est ici."
Extrait de "Le corps utopique - Les Hétérotopies", Michel Foucault
dimanche 13 septembre 2015
à la place de la bouche, il y a un trou
à la base du cou, il y a un trou
là en-dessous du ventre, un autre trou
nos corps n'en finissent pas de se dissoudre
et on continue de marcher, avec des trous à la place des jambes
droit devant soi et sans faillir, malgré les trous à la place des yeux
il n'y a pas eu de déflagration, on n'a relevé aucune blessure
tout a explosé en silence,les frappes sont chirurgicales
le sens des mots aussi d'ailleurs
finit par disparaître
dans ce trou noir
qui nous mâche
nous avale
nous recrache
et on répète en boucle "même pas peur", "même pas mal"
hein, que les trous dans le gruyère, c'est ce qu'il y a de meilleur
avec les vers
nos petites moisissures sur la ligne imprécise
du trou
que l'on remâche ressasse
l'estomac débordant de tant d'obscurités
à la base du cou, il y a un trou
là en-dessous du ventre, un autre trou
nos corps n'en finissent pas de se dissoudre
et on continue de marcher, avec des trous à la place des jambes
droit devant soi et sans faillir, malgré les trous à la place des yeux
il n'y a pas eu de déflagration, on n'a relevé aucune blessure
tout a explosé en silence,les frappes sont chirurgicales
le sens des mots aussi d'ailleurs
finit par disparaître
dans ce trou noir
qui nous mâche
nous avale
nous recrache
et on répète en boucle "même pas peur", "même pas mal"
hein, que les trous dans le gruyère, c'est ce qu'il y a de meilleur
avec les vers
nos petites moisissures sur la ligne imprécise
du trou
que l'on remâche ressasse
l'estomac débordant de tant d'obscurités
lundi 24 août 2015
lundi 10 août 2015
"[...] Comme si l’activité de la métaphore et, plus généralement, le domaine du
style, restaient sans véritable promesse pour la refiguration
individuelle et pour la compréhension poétique des formes du soi. Je
voudrais revenir sur ce parallèle et observer les décisions qui s’y
jouent pour mettre en débat la notion d’identité narrative, aujourd’hui
dominante dans nos représentations de la lecture et de la morale, et
pour faire de l’idée d’identité stylistique une autre ressource littéraire de subjectivation.
De ce que l’individu a une histoire, Ricœur conclut avec force qu’il est une histoire. Mais j’aimerais essayer cette idée qu’aussi bien l’individu est un style."
De ce que l’individu a une histoire, Ricœur conclut avec force qu’il est une histoire. Mais j’aimerais essayer cette idée qu’aussi bien l’individu est un style."
Marielle Macé, "Identité narrative ou identité stylistique ?"
Colloque L’héritage littéraire de Paul Ricœur, Université Sorbonne Nouvelle – Paris , 17 juin 2010 au 19 juin 2010
Le réel est une gousse d'ail qui finit
une fois de plus sous le martèlement du pilon
purée blanche suintante, fortement
odorante sous la pulpe du doigt
ainsi va le poème
le broiement du monde
sa matière blanche semblable à la
chair molle
qui pénètre jusque sous la
lunule de l'ongle
et tu répètes pour toi seule
car personne ne doit voir les
mouvements sous ta bouche scellée
« putain, je ne comprends rien »
tu dis « putain » et te
déteste de mettre au féminin
ton abrutissement qui pose ses forces
érectiles
comme deux doigts puissants sur tes
tempes
tout autour de toi devient glaise
sous le claquement incessant de tes
dents
ainsi va le poème
la tentative d'écrasement d'un monde
sous le rouleau compresseur du mot
est-ce que de le balancer cul par dessus
tête
te fera plus aisément pénétrer le trou de la pensée
à quel moment précis le poème cesse
de feindre
simuler
pour te dire
jeudi 6 août 2015
lundi 3 août 2015
"Une leçon" de Stéphane Bernard
"replongé dans cette eau des autres, le corps gît vite parmi les objets
qu’avec lui-même il a rejetés. livres, carnets, chimies jonchent le sol.
plus loin que le reflet dans la porte vitrée des pieds de la petite table
des enfants, ce qui organise la vie dans ce corps, c’est-à-dire je,
observe le reflet des voûtes plantaires inertes, des segments
des mollets qu’un halo grisâtre de poils recouvre. je pense à lui mort,
au cadavre défectueusement pudique dans le salon. au trésor
mais sans rien, et qui, sa serrure forcée, n’offrira que l’immondice
où le sceller. l’ombre sanieuse à frotter. et qui gâchera quelque chose
mais quoi ? je regarde - parmi les livres, les carnets, les chimies –
les reflets de ces jambes, de ces pieds derrière ceux de la petite table
comme des barreaux. je reconnaît la Leçon d’anatomie du docteur Tulp.
je regarde, observe le faux Rembrandt. s’étonne mais sans brusquerie.
les jambes sont bien reproduites. les pieds, à s’y méprendre. ce
en quoi je consiste. aujourd’hui. toujours. copie de bonne facture
d’un détail dans une peinture de maître. reproduction incomplète
d’un mort de l’art. je figure un mort. détruit par décision de justice,
déchiré par la science. comme ce corps d’Aris Kindt, détrousseur,
la jeune quarantaine. et que le pinceau à jamais auxiliaire d’un regard
lui entier dépèce et rapièce dans un geste, une vibration qui parfait
une imitation de ce qui est qui est et de ce qui est de ce qui n’est plus."
Stéphane Bernard
son blog, Une main est aussi un poing
qu’avec lui-même il a rejetés. livres, carnets, chimies jonchent le sol.
plus loin que le reflet dans la porte vitrée des pieds de la petite table
des enfants, ce qui organise la vie dans ce corps, c’est-à-dire je,
observe le reflet des voûtes plantaires inertes, des segments
des mollets qu’un halo grisâtre de poils recouvre. je pense à lui mort,
au cadavre défectueusement pudique dans le salon. au trésor
mais sans rien, et qui, sa serrure forcée, n’offrira que l’immondice
où le sceller. l’ombre sanieuse à frotter. et qui gâchera quelque chose
mais quoi ? je regarde - parmi les livres, les carnets, les chimies –
les reflets de ces jambes, de ces pieds derrière ceux de la petite table
comme des barreaux. je reconnaît la Leçon d’anatomie du docteur Tulp.
je regarde, observe le faux Rembrandt. s’étonne mais sans brusquerie.
les jambes sont bien reproduites. les pieds, à s’y méprendre. ce
en quoi je consiste. aujourd’hui. toujours. copie de bonne facture
d’un détail dans une peinture de maître. reproduction incomplète
d’un mort de l’art. je figure un mort. détruit par décision de justice,
déchiré par la science. comme ce corps d’Aris Kindt, détrousseur,
la jeune quarantaine. et que le pinceau à jamais auxiliaire d’un regard
lui entier dépèce et rapièce dans un geste, une vibration qui parfait
une imitation de ce qui est qui est et de ce qui est de ce qui n’est plus."
Stéphane Bernard
son blog, Une main est aussi un poing
samedi 25 juillet 2015
vendredi 24 juillet 2015
j'aimerais sur la page quelque chose de violent, de fort, de brutal
que la chose qui crame à l'intérieur dessine sur le papier
de longues traînées violettes
que ça gratte les yeux et les doigts de celui qui me feuillette
j'aimerais écrire avec mon ventre
que chacun sente page après page
le glissement glaireux et moite qui soulève l'estomac
que ça laboure en dedans,la bouche ou
l'oreille
seulement voilà ce qui brûle à
l'intérieur n'est qu'une chosette
un feu de paille que l'écoulement de la vie comme elle va
un feu de paille que l'écoulement de la vie comme elle va
(métro boulot dodo -les mots ne sont
même pas de moi)
éteint dans un bruit pathétique de pet mouillé
mercredi 22 juillet 2015
Dans le train
des arbres
puis d'autres
arbres /
langues vertes
sur la paroi /
vite
/ vitre
le mouvement pendulaire agite mon bassin
c'est le voyage : le ventre nouveau
où couler
sans bouger
les cils cisaillent
d'un coup la nature mobile
est un trait de couleur
vert pomme / vert raisin
vers flamme / vers mâtin
trois papilles pour la route
bouquet de tournesols dans le vase de l’œil
et le beurre dans la bouche est
la lame des rayons
/ sur ciel
partir
refaire à l'envers
la route jusqu'au trou
la pointe de l'aiguille
ôtée de la pupille
dans le train
puis d'autres
arbres /
langues vertes
sur la paroi /
vite
/ vitre
le mouvement pendulaire agite mon bassin
c'est le voyage : le ventre nouveau
où couler
sans bouger
les cils cisaillent
d'un coup la nature mobile
est un trait de couleur
vert pomme / vert raisin
vers flamme / vers mâtin
trois papilles pour la route
bouquet de tournesols dans le vase de l’œil
et le beurre dans la bouche est
la lame des rayons
/ sur ciel
partir
refaire à l'envers
la route jusqu'au trou
la pointe de l'aiguille
ôtée de la pupille
dans le train
[...]
la chose et son contraire - une sensation vertigineuse te saisit à la cime de ta chaise
le ventre enchâssé dans le corps cadenassé à la table encastrée dans la pièce scellée à l'appartement rivé à cette ville plombée à cette terre sertie dans l'univers
en un millième de seconde - un gouffre démesuré s'ouvre dans l'estomac
quel sens donner à toutes ces agitations familières
de lèvres
de langue
à quoi sert la colère quand elle se heurte au bois poli
des poupées gigogne
la chose et son contraire - une sensation vertigineuse te saisit à la cime de ta chaise
le ventre enchâssé dans le corps cadenassé à la table encastrée dans la pièce scellée à l'appartement rivé à cette ville plombée à cette terre sertie dans l'univers
en un millième de seconde - un gouffre démesuré s'ouvre dans l'estomac
quel sens donner à toutes ces agitations familières
de lèvres
de langue
à quoi sert la colère quand elle se heurte au bois poli
des poupées gigogne
mardi 21 juillet 2015
tu sais que c'est la colère
toujours
qui embrase la tête, le cœur, la bouche
avant de finir petit tas de cendres
sur le bord de la table
où il pose sa main
entre les miettes de pain
ta main
et les verres en morceaux
cela n'a rien à voir
avec ce qu'il est vraiment, avec ce que tu es au fond
tu sais et songes en un millième de seconde
à cette chose et son contraire
maintenant que les braises sont éteintes
qu'il ne reste des jets drus et violents
qu'une trace minuscule et violette
sur le bord de ta
sur le bord de sa
tout a jailli
failli
dans le fracas
les mots de haine, les mots d'amour
ah oui l'amour, que ne fait-il pas faire
ne fait-il avaler, recracher, ravaler
et vomir
ah oui l'amour
sous l'avalanche des sucs
la lente indigestion du lourd brouet
toujours
qui embrase la tête, le cœur, la bouche
avant de finir petit tas de cendres
sur le bord de la table
où il pose sa main
entre les miettes de pain
ta main
et les verres en morceaux
cela n'a rien à voir
avec ce qu'il est vraiment, avec ce que tu es au fond
tu sais et songes en un millième de seconde
à cette chose et son contraire
maintenant que les braises sont éteintes
qu'il ne reste des jets drus et violents
qu'une trace minuscule et violette
sur le bord de ta
sur le bord de sa
tout a jailli
failli
dans le fracas
les mots de haine, les mots d'amour
ah oui l'amour, que ne fait-il pas faire
ne fait-il avaler, recracher, ravaler
et vomir
ah oui l'amour
sous l'avalanche des sucs
la lente indigestion du lourd brouet
samedi 4 juillet 2015
derrière l'œil
il y a un autre œil
un peu ivre, un peu vacillant
un œil lubrique, un œil injecté de sang
un œil qui gratte
qui flatte, qui claque
un œil supersonique, un œil super bionique
qui te pense cher lecteur
dans ton simple appareil
dans ta nudité folle
dans tes ah, dans tes oh, tes mon dieu que c'est beau
tes regards de côté, ai-je bien fait d'apprécier ?
un œil qui aligne petites sottises et grandes vérités
ou le contraire
sûrement le contraire
car où mène l’œil qui pense
qui parle
avec sa gelée molle - nulle part
un œil nombril autour
duquel tout tourne
qui d'ailleurs tourne en rond
qui s'en fout, qui en joue
qui bande - rien d'inédit
jusqu'à finir aveugle dans le noir de l’écran
il y a un autre œil
un peu ivre, un peu vacillant
un œil lubrique, un œil injecté de sang
un œil qui gratte
qui flatte, qui claque
un œil supersonique, un œil super bionique
qui te pense cher lecteur
dans ton simple appareil
dans ta nudité folle
dans tes ah, dans tes oh, tes mon dieu que c'est beau
tes regards de côté, ai-je bien fait d'apprécier ?
un œil qui aligne petites sottises et grandes vérités
ou le contraire
sûrement le contraire
car où mène l’œil qui pense
qui parle
avec sa gelée molle - nulle part
un œil nombril autour
duquel tout tourne
qui d'ailleurs tourne en rond
qui s'en fout, qui en joue
qui bande - rien d'inédit
jusqu'à finir aveugle dans le noir de l’écran
![]() |
(c) Mikael Aldo |
"[...] Tu m'avais dit dès le début des mutations sauvages, que nous n'en réchapperions pas. Que tu préférais mourir en hurlant avec des milliers d'autres sur un pauvre radeau, qu'avaler sans rien dire la poussière métallique qui pleuvait matin et soir. Tu me l'avais dit, répété, soir et matin. Tu n'attendrais pas l'obscurcissement de l'horizon. Il n'y avait plus d'espoir, mais tu préférais te le dire en marchant. Et tu avais quitté la cage où nous tournions en rond depuis des mois, des années... des siècles peut-être. Nous courrions comme des chiens derrière leur queue, langue pendante derrière l'appendice zinzolin qui s'agitait frénétiquement sous notre nez. Une idée, des lettres, des mots que nous ne parvenions plus à assembler.
Tous les jours, jusqu'à l'heure précise où le soleil s’abîmait dans le fleuve, je parcourais la ville dans tous les sens, mon regard se heurtant à d'autres fantômes parcourant la ville dans tous les sens. Combien étions-nous encore à croire que quelqu'un viendrait nous sauver ?[...]"
extrait de mon texte publié dans Zinzoline n°9
mercredi 1 juillet 2015
"Z#9 : c'est tout frais
Le neuvième numéro de Zinzoline vient de sortir du four.
Il est tout chaud et croustillant grâce à Éric Babaud, Daniel Barbé, Émilie Baudrais, Alain Bergeon, Edwige Bertaudon, Angelo Bote, Laurence Bucourt, Angèle Casanova, Thomas Chéronnet, Franck David, David de Souza, Marianne Desroziers, David Escarpit, Simone Hick, Véronique Joyaux, Nadu Marsaudon, Murièle Modély, Maria Morisot / Moan Lisa, Christophe Pilard, Henri Plandé, Christophe Sartori , Alice Scaliger, Olivier Seguin, Lucie de Syracuse, Jacques Taris, Marlène Tissot, Olivier Ulivieri, Pierre Verny."
- avec un texte by myself #ecrituresouscontrainte
Le neuvième numéro de Zinzoline vient de sortir du four.
Il est tout chaud et croustillant grâce à Éric Babaud, Daniel Barbé, Émilie Baudrais, Alain Bergeon, Edwige Bertaudon, Angelo Bote, Laurence Bucourt, Angèle Casanova, Thomas Chéronnet, Franck David, David de Souza, Marianne Desroziers, David Escarpit, Simone Hick, Véronique Joyaux, Nadu Marsaudon, Murièle Modély, Maria Morisot / Moan Lisa, Christophe Pilard, Henri Plandé, Christophe Sartori , Alice Scaliger, Olivier Seguin, Lucie de Syracuse, Jacques Taris, Marlène Tissot, Olivier Ulivieri, Pierre Verny."
- avec un texte by myself #ecrituresouscontrainte
lundi 22 juin 2015
les mots sont sur la page ou la peau
tout à fait factuels
sortir de la maison est un fait
s'entasser dans le métro est un fait
regarder avec insistance, éviter les regards tout aussi insistants
sont des faits
ne rien comprendre au bordel de la ville est un fait
y ôter deux lettres, mais ne pas saisir pour autant ce qu'est
la vie est un fait
marcher vite est un fait
penser court est un fait
aligner des phrases sans queue ni tête est un fait
semer la métaphore, cultiver, jouir de la peur
des mots
sont des faits
parler pour ne
rien dire
ne faire
que faire
la langue souvent est aussi sèche que la tête
tout à fait factuels
sortir de la maison est un fait
s'entasser dans le métro est un fait
regarder avec insistance, éviter les regards tout aussi insistants
sont des faits
ne rien comprendre au bordel de la ville est un fait
y ôter deux lettres, mais ne pas saisir pour autant ce qu'est
la vie est un fait
marcher vite est un fait
penser court est un fait
aligner des phrases sans queue ni tête est un fait
semer la métaphore, cultiver, jouir de la peur
des mots
sont des faits
parler pour ne
rien dire
ne faire
que faire
la langue souvent est aussi sèche que la tête
jeudi 11 juin 2015
Le bonheur
à la fenêtre
tu
pauses
les yeux noyés
dans le bol de crème
derrière la vitre
la grande bleue
à ton oreille
les abeilles
dans l'un
ou l'autre
de tes ventricules
tu
rêves
un carré de ciel jaune
dans les cheveux
tu
pauses
les yeux noyés
dans le bol de crème
derrière la vitre
la grande bleue
à ton oreille
les abeilles
dans l'un
ou l'autre
de tes ventricules
tu
rêves
un carré de ciel jaune
dans les cheveux
lundi 25 mai 2015
Voilà c'est fait, j'ai
acheté l'économe :
Son manche est noir, sa lame est aiguisée, ses promesses infinies
Son manche est noir, sa lame est aiguisée, ses promesses infinies
Les soirées à venir
seront longues et vibrantes, à éplucher en chœur nos désirs
À mettre à nu sous
l'écorce des jours, sous les strates verticales du quotidien
Sous la monotonie
grasse sur tes hanches et tes reins, l'aigu des chairs
Crois-moi, cela ne fait
pas mal, de raboter un peu le sentiment
Maintenant, tends les
joues, les fesses, allonge tes deux bras
Laisse moi faire,
découper en lamelles l'épiderme et le derme
Regarde, ne crie pas,
c'est tout joli, ces bouts de toi, de moi
Dans le lit nous
appellent, regarde comment j'épelle, pèle
Notre a m o
u r en miettes
mardi 5 mai 2015
lundi 27 avril 2015
la grenade est le crâne, la mémoire est le fruit
qui doucettement décomposent au fond de l'assiette
qui doucettement exhalent des sucs âcres
baignent dans cet oubli où des insectes grouillent
on entend les élytres vibrer contre le cuir chevelu
on entend les frottements saccadés déchirer la longue cicatrice
sur nos visages, des mofettes s'exilent
des fumerolles font des dégâts irréversibles
c'est ainsi que sur la table giclent nos souvenirs
sur la page, des souvenirs
car il est impossible d'user du nous quand il s'agit de tout reconstruire
les images qui me
qui nous reviennent
sont incomplètes, incomprises
tu me regardes et je m'épelle
je t'observe et te rappelle
au cœur de la phrase
chaque grain rose, sucré dissimule en son sein
un ciel bleu et violet, des nuages orangés
la peau flétrie d'enfance
dans le poème, le passé affabule
tout fleure nos absences
les mots nous recommencent
qui doucettement décomposent au fond de l'assiette
qui doucettement exhalent des sucs âcres
baignent dans cet oubli où des insectes grouillent
on entend les élytres vibrer contre le cuir chevelu
on entend les frottements saccadés déchirer la longue cicatrice
sur nos visages, des mofettes s'exilent
des fumerolles font des dégâts irréversibles
c'est ainsi que sur la table giclent nos souvenirs
sur la page, des souvenirs
car il est impossible d'user du nous quand il s'agit de tout reconstruire
les images qui me
qui nous reviennent
sont incomplètes, incomprises
tu me regardes et je m'épelle
je t'observe et te rappelle
au cœur de la phrase
chaque grain rose, sucré dissimule en son sein
un ciel bleu et violet, des nuages orangés
la peau flétrie d'enfance
dans le poème, le passé affabule
tout fleure nos absences
les mots nous recommencent
samedi 25 avril 2015
vendredi 17 avril 2015
il faut rester à la surface
ne pas songer à du second degré
- l'expression te donne la chair de poule
il faut rester sur la croûte des mots
se contenter de leur lécher la peau
c'est âcre
acide
plus souvent insipide
tu fermes les yeux
avales
regardes l'homme gonflé à bloc
expulser par son orifice ad hoc
- le bel églefin t'enfume
une sentence, un diktat, une solution
tout semble équivalent
dans ton oreille rouillent les mots qui s'y déroulent
sans espace ni ponctuation
unesentenceundiktatunesolution
- le déroulé de lettres te ceinture la tête
tu danses, fanfaronnes
ne comprends pas
ne pas songer à du second degré
- l'expression te donne la chair de poule
il faut rester sur la croûte des mots
se contenter de leur lécher la peau
c'est âcre
acide
plus souvent insipide
tu fermes les yeux
avales
regardes l'homme gonflé à bloc
expulser par son orifice ad hoc
- le bel églefin t'enfume
une sentence, un diktat, une solution
tout semble équivalent
dans ton oreille rouillent les mots qui s'y déroulent
sans espace ni ponctuation
unesentenceundiktatunesolution
- le déroulé de lettres te ceinture la tête
tu danses, fanfaronnes
ne comprends pas
samedi 11 avril 2015
certains jours, l'acuité est à son maximum
c'est le moment précis où sortir de son trou
où tenter d'un regard de dévorer le monde
le trottoir contient l'humanité
voilà ce que les mères chuchotent aux oreilles des hommes
je le dis moi aussi aux enfants derrière la porte close
ces jours-là, je sors, fourre le tout dans un cabas
la main de la fille, la langue du fils, ballottent au fond du sac
la tête de l'homme sur mon crâne oscille comme une coque
ces jours-là, je parle possédée
à des morceaux de corps accrochés à mon corps
je dis : regardez les chairs s'épeler, nos mâchoires déchaussées grincer
ces jours-là, chaque sortie prend des allures de fête macabre
des femmes et des hommes se mettent tranquillement nus
dans un furieux tintamarre, leurs cœurs s'entrechoquent
mais la nuit tombe
et les ombres de nos corps contre les murs mangent
c'est le moment précis où sortir de son trou
où tenter d'un regard de dévorer le monde
le trottoir contient l'humanité
voilà ce que les mères chuchotent aux oreilles des hommes
je le dis moi aussi aux enfants derrière la porte close
ces jours-là, je sors, fourre le tout dans un cabas
la main de la fille, la langue du fils, ballottent au fond du sac
la tête de l'homme sur mon crâne oscille comme une coque
ces jours-là, je parle possédée
à des morceaux de corps accrochés à mon corps
je dis : regardez les chairs s'épeler, nos mâchoires déchaussées grincer
ces jours-là, chaque sortie prend des allures de fête macabre
des femmes et des hommes se mettent tranquillement nus
dans un furieux tintamarre, leurs cœurs s'entrechoquent
mais la nuit tombe
et les ombres de nos corps contre les murs mangent
mercredi 8 avril 2015
mappemonde
dimanche 5 avril 2015
vendredi 3 avril 2015
dimanche 29 mars 2015
humeur à moudre
sometimes i feel sad
j'essaie une autre langue et me dis que peut-être
la tristesse fuira dans le mood incliné
ce friselis liquide à l'envers de la joue
je plisse dans les o
ma bouche et mes paupières
roulent des mécaniques dans les ronds de fumées
j'écoute le m
ma petite giclée contre une minuscule
à la fin de la phrase
se noie
le d
à moudre
j'essaie une autre langue et me dis que peut-être
la tristesse fuira dans le mood incliné
ce friselis liquide à l'envers de la joue
je plisse dans les o
ma bouche et mes paupières
roulent des mécaniques dans les ronds de fumées
j'écoute le m
ma petite giclée contre une minuscule
à la fin de la phrase
se noie
le d
à moudre
lundi 23 mars 2015
samedi 21 mars 2015
Lu un poème de Jack Hirschman sur Branloire Pérenne
" Tout d'un coup les morts j'ai plus envie de m'en souvenir
et mes bons sentiments ne crèvent plus d'envie de poème.
Un calme irrésistible m'emporte, allongé
dans ma chambre d'hôtel à San Francisco.
Les tâches à faire, la révolte dans mon stylo,
tout a capitulé devant cette détente
une rêverie sur rien de précis.
Dehors, le monde : sifflements et tornades,
mais je me penche plutôt sur les poils de mon torse.
Ca fait quarante ans qu'ils sont là - ou plus -
du diable si je les ai remarqués avec tout ce boulot,
et maintenant ils virent au gris.
Tout d'un coup je sens que je les ai ratés, eux
et leur rousse jeunesse, leur art mystérieux d'attirer
des foules de baisers sur la peau qui se cache par en-dessous.
Ils ne m'ont pas vraiment beaucoup intéressé,
encore moins au point de vue sensuel,
et maintenant ils seront bientôt blancs, et qu'est-ce que je peux en dire ?
Qu'ils ne m'appartenaient pas ?
Qu'ils ne signifiaient pas grand'chose ?
Quand on aborde cette vieille route du corps
tout le monde TOUT DOIT ETRE CARESSE * "
Jack Hirschman (trad. G.B.Vachon)
* La fin de vers est tirée d'un poème de Whitman
Extrait de J'ai su que j'avais un frère de Jack Hirschman, Le Temps des Cerises,1998
Récupéré sur le blog de Frédérik Houdaer (qui anime -entre autres choses- le Cabaret poétique à Lyon)
vendredi 20 mars 2015
vendredi 13 mars 2015
"l'odeur qui rampe sur les murs
à chaque fois que la chambre redevient un tombeau
n'a rien à voir avec la mort
avec le sexe
avec le cul
avec nos miasmes
n'a rien à voir avec l'amour non plus
je sais au moment où s'avancent mes mots
à l'instant même où l'orage s'invite
où nos yeux s'assombrissent dans le feu du charbon
que cette odeur qui fond comme peau sur nos os
nous ramène à la vie pour planter son couteau"
à chaque fois que la chambre redevient un tombeau
n'a rien à voir avec la mort
avec le sexe
avec le cul
avec nos miasmes
n'a rien à voir avec l'amour non plus
je sais au moment où s'avancent mes mots
à l'instant même où l'orage s'invite
où nos yeux s'assombrissent dans le feu du charbon
que cette odeur qui fond comme peau sur nos os
nous ramène à la vie pour planter son couteau"
extrait de Je te vois, éditions du Cygne, 2014
mercredi 11 mars 2015
On en parle #7
Jacques Morin parle de Je te vois dans le dernier Décharge (n°165) - rubrique Diaphragme-Notes de lecture :
"La peur comme un serpent m'attache au lit/ la fenêtre est ouverte / j'entends le soleil
Voilà comment commence le troisième recueil de Murièle Modély qui montre un mûrissement dans son écriture. On la lit avec intensité d'un bout à l'autre où l'on subit un certain envoûtement dans cette parole presque imprécatoire par moment. Sa poésie montre et désigne avec insistance, et cette ostentation caractérise sa quête personnelle entre charnel et spirituel. Le recueil est constamment dédié à la seconde personne du titre, l'amant, dans des rapports d'attraction et de répulsion : je te refuse le mot / la parole / la phrase l'onomatopée / je te cède concède / le grognement... Amour bestial, brutal, sauvage, violent [...] Le regard, la mastication, et aussi brusquement son pendant social, avec le suicide au travail. On est parfois au bord de la magie et de la sorcellerie, et cette poésie demeure fascinante. La mort petite ou grande dans le ventre du jour."
"La peur comme un serpent m'attache au lit/ la fenêtre est ouverte / j'entends le soleil
Voilà comment commence le troisième recueil de Murièle Modély qui montre un mûrissement dans son écriture. On la lit avec intensité d'un bout à l'autre où l'on subit un certain envoûtement dans cette parole presque imprécatoire par moment. Sa poésie montre et désigne avec insistance, et cette ostentation caractérise sa quête personnelle entre charnel et spirituel. Le recueil est constamment dédié à la seconde personne du titre, l'amant, dans des rapports d'attraction et de répulsion : je te refuse le mot / la parole / la phrase l'onomatopée / je te cède concède / le grognement... Amour bestial, brutal, sauvage, violent [...] Le regard, la mastication, et aussi brusquement son pendant social, avec le suicide au travail. On est parfois au bord de la magie et de la sorcellerie, et cette poésie demeure fascinante. La mort petite ou grande dans le ventre du jour."
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mardi 10 mars 2015
chaque jour un os, puis un autre
se plante dans un œil, puis dans l'autre
la mort rode avec sa vieille odeur tenace
chaque jour je feuillette, j'écoute, une nouvelle, puis une autre
le disque de plomb semble rayé au fond de l'estomac
chaque jour, sous le cliquetis des débris de squelettes jetés sur mon corps
je perçois tout là-haut, dans le ciel, le silence fugace et prégnant
des nuages moutonnants au présent
se plante dans un œil, puis dans l'autre
la mort rode avec sa vieille odeur tenace
chaque jour je feuillette, j'écoute, une nouvelle, puis une autre
le disque de plomb semble rayé au fond de l'estomac
chaque jour, sous le cliquetis des débris de squelettes jetés sur mon corps
je perçois tout là-haut, dans le ciel, le silence fugace et prégnant
des nuages moutonnants au présent
lundi 9 mars 2015
On sort toujours vivant du poème
On sort toujours vivant du poème
Un mort dans le poème
N'a rien d'étrange. Au contraire.
Beaux corps crânes bras et jambes
Éparpillés
Dans des mots de peur
Dans un formol de nostalgie
Intacts
Cadavres exquis
Des sentiments. Et suicidés
Idéaux bien sûr (vous connaissez
le sens présent d'idéaux)
Quelle que soit la page qu'on soulève.
Morts chanceux que ceux-là,
Dont nous oublions
Combien leur existence fut inexistante.
Tandis qu'ailleurs
(Vous savez aussi ce qu'ailleurs veut dire)
Le sang est versé
Le sang refroidit
Le sang coagule
(La réalité, voyez-vous
ne sait pas faire de beaux vers)
Et les métastases triomphent
Avec des sauts
En profondeur.
Le scanner n'est pas un stylo
(Les métaphores faciles
font mal en ces instants)
Et l'on ne va pas tenter l'anesthésie
Sur des douleurs
Imaginées
Ou écrites.
Il ne faut pas se faire d'illusions.
On sort toujours vivant du poème.
Un mort dans le poème
N'a rien d'étrange. Au contraire.
Beaux corps crânes bras et jambes
Éparpillés
Dans des mots de peur
Dans un formol de nostalgie
Intacts
Cadavres exquis
Des sentiments. Et suicidés
Idéaux bien sûr (vous connaissez
le sens présent d'idéaux)
Quelle que soit la page qu'on soulève.
Morts chanceux que ceux-là,
Dont nous oublions
Combien leur existence fut inexistante.
Tandis qu'ailleurs
(Vous savez aussi ce qu'ailleurs veut dire)
Le sang est versé
Le sang refroidit
Le sang coagule
(La réalité, voyez-vous
ne sait pas faire de beaux vers)
Et les métastases triomphent
Avec des sauts
En profondeur.
Le scanner n'est pas un stylo
(Les métaphores faciles
font mal en ces instants)
Et l'on ne va pas tenter l'anesthésie
Sur des douleurs
Imaginées
Ou écrites.
Il ne faut pas se faire d'illusions.
On sort toujours vivant du poème.
(et merci à Christine)
samedi 7 mars 2015
Mézin fête les écrivains - 7 juin 2015
12 auteurs dans les jardins paysagers de Mézin, installés par deux
sur des bancs, lisant leurs textes et ceux de leur binôme... Je serai
avec Jean-Baptiste Pedini, nous échangerons nos mots.
Vous pourrez aussi entendre Gilles-Marie Baur, Julien Campredon, Serge Cazenave-Sarkis, Anna De Sandre, Emilie Kah, Jean-Louis Lebreton, Jean-Jacques Marimbert, Dany Moreuil, Derek Munn et Marlène Tissot.
Le programme là, des infos au jour le jour sur le festival sur la page facebook, animée par Marianne Desroziers, l'organisatrice
Vous pourrez aussi entendre Gilles-Marie Baur, Julien Campredon, Serge Cazenave-Sarkis, Anna De Sandre, Emilie Kah, Jean-Louis Lebreton, Jean-Jacques Marimbert, Dany Moreuil, Derek Munn et Marlène Tissot.
Le programme là, des infos au jour le jour sur le festival sur la page facebook, animée par Marianne Desroziers, l'organisatrice
samedi 28 février 2015
il paraît que notre présence sur terre aurait à voir
avec l'expulsion dans l'espace de matières organiques par des sphères de titane
les scientifiques sont perplexes : comment est-il possible que du vivant batte sous le métal ?
comment est-il possible de croire encore en nos agitations ?
dehors le monde
dehors la ville
dehors famille
et dehors toi aussi
hein, que nos peaux de fer sont les meilleures cuirasses pour nos chairs increvables
que coulent le sang, les larmes
nous sommes inoxydables sous tous les ricochets
avec l'expulsion dans l'espace de matières organiques par des sphères de titane
les scientifiques sont perplexes : comment est-il possible que du vivant batte sous le métal ?
comment est-il possible de croire encore en nos agitations ?
dehors le monde
dehors la ville
dehors famille
et dehors toi aussi
hein, que nos peaux de fer sont les meilleures cuirasses pour nos chairs increvables
que coulent le sang, les larmes
nous sommes inoxydables sous tous les ricochets
mercredi 25 février 2015
mardi 24 février 2015
je devrais pour une fois, plutôt que de malmener la pulpe de mes index
(je ne tape qu'avec deux doigts, tu le sais bien)
je devrais pour une fois espérer ton retour
m'enrouler dans la nuit, ouvrir aux quatre vents ma bouche et mes paupières
je devrais prendre l'air, inspirer par les yeux ce qui de nous s'échappe
ton ombre fabuleuse collée à mes talons, mon mystère poisseux, nos tout petits poissons
est-ce normal dis moi, de boire la tasse sans apaiser sa soif
est-ce normal de jouir ainsi des lettres et des espaces
je m'interroge, tape, diffère, dis verse, diverge
les mots font des bulles au fond de l'océan
je pulse, j'azerty, j'yuiop, pense à toi dans les microscopiques accrocs de mes inspirations
je devrais pour une fois tenir la phrase, énucléer les métaphores
(mais tu sais combien j'aime poser mon corps tout au fond de l'amphore
- et que ne ferai-je pas pour une incise à rimes)
je devrais pour une fois
prendre le mot
pour ce qu'il est
t'attendre
te regarder
ouvrir la porte
dire
je suis rentré
(je ne tape qu'avec deux doigts, tu le sais bien)
je devrais pour une fois espérer ton retour
m'enrouler dans la nuit, ouvrir aux quatre vents ma bouche et mes paupières
je devrais prendre l'air, inspirer par les yeux ce qui de nous s'échappe
ton ombre fabuleuse collée à mes talons, mon mystère poisseux, nos tout petits poissons
est-ce normal dis moi, de boire la tasse sans apaiser sa soif
est-ce normal de jouir ainsi des lettres et des espaces
je m'interroge, tape, diffère, dis verse, diverge
les mots font des bulles au fond de l'océan
je pulse, j'azerty, j'yuiop, pense à toi dans les microscopiques accrocs de mes inspirations
je devrais pour une fois tenir la phrase, énucléer les métaphores
(mais tu sais combien j'aime poser mon corps tout au fond de l'amphore
- et que ne ferai-je pas pour une incise à rimes)
je devrais pour une fois
prendre le mot
pour ce qu'il est
t'attendre
te regarder
ouvrir la porte
dire
je suis rentré
lundi 23 février 2015
samedi 14 février 2015
Vincent & compagnie - mgv2>publishing
Après Stéphane Bernard et Cathy Garcia, c'est Vincent qui m'a invité dans le projet "x & compagnie" initié & édité par Walter Ruhlmann. En avril c'est donc Vincent & compagnie (le 4è de la série)
Au sommaire : Alexandra Geyser, Frank Rebelle-Cohen, GMC, Guillaume Siaudeau, Heptanes Fraxion, Perrin Langda, Mike Kasprzak , Murièle Modély, Nutsie Nutsie, Patrice Maltaverne, Perrine Le Querrec, Bernard Lherbier, Séverine Castelant, Agnès, Marlène Tissot
et ça se passe là (d'un clic sur l'image) / Merci donc à Vincent & Walter
Au sommaire : Alexandra Geyser, Frank Rebelle-Cohen, GMC, Guillaume Siaudeau, Heptanes Fraxion, Perrin Langda, Mike Kasprzak , Murièle Modély, Nutsie Nutsie, Patrice Maltaverne, Perrine Le Querrec, Bernard Lherbier, Séverine Castelant, Agnès, Marlène Tissot
et ça se passe là (d'un clic sur l'image) / Merci donc à Vincent & Walter
![]() |
mercredi 11 février 2015
dimanche 8 février 2015
brai(ll)ement
tu vois ce qui se passe quand on parle
trop
c'est ce qu'il dit
assis de l'autre côté de la table
enfournant dans sa bouche
un quignon
énorme
qui roule
galet rocher falaise
qui tape
lèvre langue palais
qu'il mâche
la bouche est
pleine
le trou s'ouvre
la ferme
il dit
tu vois quand on parle trop
tu ne sais pas de quoi
ta bouche ton chas
d'aiguille
les perles qui les enfile ?
/
il dit tu vois
ce qui se passe
dans le miroir derrière la table
ta bouche énorme
est grande ouverte
il mâche remâche ressasse
et toi tu gardes regardes
le mot lié à la gencive
cherches à couper le flot qui file
fil filet salive
ton regard paire de ciseaux hésite
/
tu vois ce qui se passe
quand on parle trop
les mots se perdent
te perdent
tu ne comprends plus la joue
sur laquelle ta phrase rebondit
tu ne comprends plus la bouche
qui écarte des jambes donne vie
tu vois en bas dedans dessous
tout le fatras
tu vois l'accumulation des lettres
cul par dessus tête
tu vois ce qui se passe quand tu ne
comprends plus
cette giclée violente dont tu ignores
le sens
est-ce que ça rentre
est-ce que ça sort
/
tu vois ce qui se passe quand on parle
trop
trop vite
trop fort
trop longtemps
trop d'effort
trop con
confit contrit larmes sang babil
ça coule
trop
simple
trop
complexe
tu vois ce qui se passe
tu ouvres la fermes
la bouche
formule écoute n'écoute rien
parle parle glose
jusqu'à planter la langue tout au fond
de la gorge
jusqu'à piler la phrase au bout de
l'intestin
jusqu'à ce mot de trop jusqu'à ce
premier mot
râpé usé craché vomi pulvérisé
sur l'endomètre
/
tu vois ce qui se passe quand on est
infoutu
de faire coïncider la bouche avec la
langue
cette muqueuse qui mène - ô long
couloir
de l'œil aveugle à l'orchidée
calice où déposer des vers
impermanence
ce qui se passe - ô long délice
quand personne
personne ne comprend
tu vois
combien la parole est
combien la parole est
muette
ne veut rien dire
strate après strate
des phrases des paragraphes
des faits encore défaits
tous les deux face à face
matin et soir à singer
le mot dans le gros in-
festin - ô joie des asticots
/
tu vois ça passe
faut que tout passe
suffit de mordre la lunule
pleine de crasse
pleine de crasse
répète incante presque sincère
cette prière
cette prière
pendant que lui secoue du bout de la
cuillère
la soupe
encore encore l'autel la mire
le soir baisser la tête et dire
je vous salue Divin Billet
je vous salue Céleste Phrase
je vous salue Sainte Formule
je vous salue Ô Puissant Joug
je vous sal - ô vois ce qui passe
à même l'écran sur le clavier
je vous salue mes servitudes
je vous salue tes certitudes
/
tu vois
tout s'amenuise
ton nez petit
ta bouche petite
ta pensée même microscopique
et ton poème
ahane
brait
renâcle
te fout ses deux pattes arrière
au milieu du plexus
et tu n'as pas mal
et tu n'as pas mal
car la douleur aussi est
petite
petite son expression
un petit ah deux petits oh
l'intégralité de la phrase
s'effiloche comme la peau
à gauche à droite ton œil file ta
bouche surfile
et le mot sème manque d'étoffe
/
tu vois combien à force
de régularité d'usure de verbes
ouvrir fermer
le mot finit dans l'insalivation
la lente et continue dé-
composition
lèvres dents mâchoires
claquent tapent agitent excitent
de l'autre côté de la table
le visage bleu
vert
lente putréfaction des mots
à la fenêtre tu vois tout passe
les vieux restes de phrases éclatent
/
tu vois ce qui se passe le soir
dans le foyer
cette condamnation perpétuelle à
ouvrir
fermer
la bouche ne pas parler faire croire
tu vois la langue est
après avoir été
à la lisière des lèvres gercées
du trou immense où tout finit par
s'aspirer
la langue est
factuelle
tu vois ce qui se passe le nez collé à
ton assiette
malgré tes yeux roulant dans tous les
sens
paupières ouvertes fermées
se saisissant du moindre indice
dissimulé
dans les lignes obliques du papier
peint
dans les lignes électriques qu'on voit
au loin
dans la ligne les phrases
courtes
simples
à la portée
simples
à la portée
musique entêtante d'un présent
dépenaillé
la langue est
actuelle et sans passé
/
tu vois ce qui se passe
à dérouler sans fin les faits du jour
à guetter sur la table le moindre
postillon
à déplorer ensemble nos rétrécissements
tu vois nos vieilles peaux usées
râpées patinées par le mot
qu'est ce qui nous meut vraiment à
part la peur ?
voilà en fait le mot dont on connaît
par cœur
la pure essence
tu vois ce qui se passe quand la peau
flanche
quand les seins tombent quand le ventre
s'affaisse
et qu'il ne reste plus de stable
que ce trou noir où mon poème âne vacille
dans des hi han désaccordés
que ce trou noir où mon poème âne vacille
dans des hi han désaccordés
au début ce fut un vase co (avec Marianne Desroziers), lu ci dessous par Angèle Casanova, puis un débordement
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