lundi 9 décembre 2024
... Jour neuf (extrait)
de celui qui tient la loupe
de celui qui a le vocabulaire en bouche
de celui qui glose glousse glougloute
Parfois, on rit en douce
cette histoire de main nous passe
par dessus la tête
le ciel
les nuages
cette main qui ne nourrit pas son homme
mais invite
au voyage
samedi 7 décembre 2024
Tombée la nuit,...(extrait)
ce souvenir du commencement
que la mémoire trompeuse tente de ranimer
et on se demande si deux pinces d'inox
en tenaille sur nos tempes
peuvent renouer les fils du passé
on se demande
une chose saugrenue remplaçant l'autre
quand surgira le premier rayon de soleil
pour foudroyer la douleur tenace
qui vrille nos tympans
jeudi 5 décembre 2024
vendredi 4 octobre 2024
Gestion de natures mortes
les hommes aussi
vont et viennent
perches à fruits s'agitant
parfois la chose ou l'homme
la fente où planter les dents
bizarre ta pensée, massif
finira bien par décentrer
et la chose - ou est-ce l'homme
que s'écrasent au sol les mirabelles
leur chair saturée de sucre
jeudi 29 août 2024
La pluie dans la chambre
sous l'oreiller
Elle est émoussée
mais ta peau est lisse
et plus vraiment ferme
Je n'aurai pas
à appuyer
pour fendre
-
J'ai une lame
pour cette nuit
A cause de ta tête
sur moi penchée
De ton visage
nettement dessiné
à la surface
-
Chacun de tes traits m'est familier
Pourtant je ne te reconnais pas
Tes yeux
Tes rides
Ta bouche
Ton nez
Ton masque
-
Ce soir
ton crâne se fendra
comme une orange
Chaque quartier
jutera dans mon oeil
sur le lit
Au milieu
je verrai la branche
grouillant de pucerons
et les fourmis
Je guetterai la pluie
au coin de ma paupière
J'attendrai la tombée
du miellat de tes chairs
lundi 3 juin 2024
... Longtemps
écorche, râpe
ma pensée et mes pieds
jusqu’à ce qu’un sursaut
dans la moiteur des draps
Longtemps, j’ai écrit
des circonvolutions
de ma bouche
de ma langue
mes neurones
sauce blanche du cerveau
montées en mayonnaise
ma névrose et la fuite
des images et des mots
Je glisse, je tombe
entraînant à ma suite ce trou noir, la mémoire
le déroulé des phrases, le bruit blanc des lettres
qui s’emballent, s'empêtrent dans mes gribouillis
cette plâtrée épaisse tout de non ou de oui
où chaque bulle d’air éclate sur la langue
Longtemps...
les fractures friables sur le dos de la bête
les blessures que mes pas épargnaient en riant
J’avais... six ans... dix ans... trente ans
la pointure élastique, presque toutes mes dents
le lait, la sagesse coulant et s’écoulant
de mes tétons pointant à mes seins lourds de graisse
une poignée d’années, toujours la même adresse
Longtemps, j’ai cru que le temps était une boucle
un bracelet métallique qui clique cliquetique
à mon poignet, la chaîne qui chante sa chanson
« Maillons, maillons, maillons
le recommencement »
J’ai atteint le sommet et maintenant je glisse
arrachant de mes mains des touffes d’herbes rousses
aiguisant mon haleine aux aigus des cailloux
que les plaies de ma bouche en rigoles nourrissent
la terre de l’enfance au fond de la vallée
Je glisse, je tombe, ricoche, entraînant dans ma chute
le bruit des souvenirs tout au fond de mes poches
sous mes fesses la douleur, le doux jaune ecchymose
[...]
lundi 27 mai 2024
V(i)eille - 3
de faire oublier par une fausse vigueur
pour éviter le gras ceinturant nos pensées
faire croire en contractant bien fort le périnée
qu'on éloignera longtemps la fuite des années
pourquoi se tartiner de beurre pour remplir les vides
regarder les regards louvoyer sur nos rides
pourquoi ne peut-on tout simplement pas
profiter
des lueurs de fin de jour
avant l’obscurité
V(i)eille - 2
vieille
dénudée et ridée
tourne en rond comme un poulet sans tête
sur le trottoir
fait des bruits de peaux flasques
agite ses cheveux longs et blancs, roule des yeux hagards
exhale une odeur sure
de poisson et de cendres
une femme vieille
vieille
lourde et tordue
offre son sexe mort aux regards des passants
titube sur le bord puis chute lourdement
dans l’un des nids de poule, petits tombeaux offerts
aux oiseaux souffreteux
à la misère des corps
V(i)eille
une femme aux yeux semblables aux miens
perd la vue
une femme au ventre lourd comme le mien
à moitié nue
ses cheveux grésillant dans un gris lumineux
à l’horizon, la lune tombe et crache
une histoire sombre dont on connaît la suite
un conte terrible dont on nous tait la fin
Le temps passe
une femme ouvre la bouche grand
claque des mâchoires comme une pelleteuse
creuse dans les fondations de la maison
une forme parfaite
rectangulaire
une forme parfaite
dont la surface s’amoindrit
à mesure que les os se tassent
une forme parfaite pour contenir
un corps rabougri perclus de souvenirs
mercredi 1 mai 2024
"Rhizome" Paul Wamo
[Ai vu pour la première fois (enfin) Paul Wamo à Toulouse à l'occasion de la finale du concours-concert de poésie slamée organisée par l'Académie des jeux floraux :sa performance de Rhizome en voix nue droit au coeur]
lundi 29 avril 2024
5
sans fin
nos morts se désagrègent
le long
du puits sans fond
remontent
des phénomènes étranges
inexpliqués
des corps poreux
vers
des vivants noyés
dans une mare de larmes
sans rive ni bord
la fiction
inonde la maison
*
ceint par notre visage
un noir insondable
et quelqu'un demande
est-ce que tout va bien ?
sur la peau molle du crâne
on ne voit que les grimaces
les rictus et les bouches
cul-de-poule et personne
ne comprend vraiment
ce tout
va bien
*
petite Alice encombrée par ces morceaux
hétéroclites de souvenirs qui flottent à la surface
comment pourras-tu seulement retrouver pied
quand sauras-tu quitter ce conte
pour avaler le beau
le sur
réel
samedi 27 avril 2024
4
je ne partagerai pas une série de textes pour...
je ne dirai plus le nom de...
des chicots l'ont réduit au néant
il ne reste plus rien dans...
mon corps
est une canette dont la languette
a été tirée trop brutalement
de mes yeux, mes oreilles, mon sexe
des flux, des flots, des geysers
jaillissent et ruissellent sa...
la mort
de sa bouche édentée
malaxe et m'avale
entièrement
dimanche 21 avril 2024
3
une étole violette et une odeur d'encens
dans sa barbe bien faite, la lotion de benjoin
tapotée le matin, sur sa peau toute fraîche
l'apprêt bien ordonné pour filer l'homélie
je ne connaissais pas le petit curé
je ne connaissais plus le petit cadavre
caché dessous le bois du cercueil, la forêt
son humus et la mousse qui nous tendaient les bras
j'étais là et ailleurs et du curé singeais
tous les gestes et répétais
tous ses mots et tentais
de raccrocher la mort à l'autre mot idiot
l'homonymie sanglante poêlée au balsamique
des pensées chaotiques pour peine famélique
vendredi 12 avril 2024
2
Ils cognent le plateau dans des rires essoufflés
des phrases inachevées, des silences pleins ou vides
Ils s'empilent comme des cairns instables à nos pieds
Nous savons qu'en partant notre pas sera un peu moins ferme
Mais le ciel est bleu et le soleil ardent
nous fait tenir debout
1
Nous nous rencontrons pour la première fois
Et déjà nous poussons nos morts
comme des pions sur la table.
Sur le damier, nous ignorons la couleur des pièces
Nous devisons de nos morts, autour de la tablesans savoir lequel, du blanc, du noir
mangera l'autre.
dimanche 17 mars 2024
lundi 11 mars 2024
Poussière dans nos têtes
poussière dans nos corps
poussière autour, poussière
dans les moindres recoins
de la poussière
partout
suffoque et pleut
envahit et croule
étouffe chaque cellule
je me demande qui
a planté sa paille pour siffler ma moelle
je me demande qui
joue du bongo avec les lobes de mon cerveau
Comme tous les autres, je marche, roule
roulis, éboulis
avec une tête creuse aboulique plantée sur un corps mou
cela fait de la musique quand nos coques vides se cognent
sur les trottoirs, c'est le ballet des crânes ruginés
le concert de leurs sonorités argentines
Où donc la chair s’est-elle fait la malle ?
dans quel bocal ont coulé nos pensées ?
ces poissons qui filent dans l’aquarium trouble
où l’on entend quand même malgré l’ignorance qui pèse
le maillet tapant la vitre vert-de-gris
où l’on entend aussi les acouphènes qui fêlent nos silences
la symphonie des cloches à un enterrement